L’activité spirituelle, très
présente, rythme la vie de la communauté rurale. Les fêtes religieuses,
nombreuses tout au long de l’année, sont généralement les seuls moments
de repos de cette campagne laborieuse. De nombreuses chapelles associées
aux habitats nobles affirment la dévotion du peuple de Betton.
Disséminées dans la campagne, elles ne concurrencent pas l’espace
paroissial organisé à proximité du prieuré.
Au départ l’église n’est qu’une
simple chapelle entourée de son espace funéraire. Des documents
iconographiques, retrouvés aux archives départementales, montrent qu’il
s’agit d’un édifice construit en deux phases. La première est un
simple bâtiment au porche d’entrée Est surmonté d’un petit
clocher (ou petit campanile). La seconde phase déplace le pignon est de
quelques mètres. Cette extension a pour conséquence de placer le clocheton
au centre de la ligne de faîtage de la toiture. Puis arrive en appendice
latéral la chapelle Beaumanoir. Si le dessin du modeste édifice religieux
donne l’image d’une construction simple, éclairée de quelques baies de
type roman et gothique, les seules ornementations paraissent se limiter à
une série de vitraux de belle qualité. Ils sont des donations de la
famille dominante : les de Saint Gilles. Ces vitraux quadrichromiques
sont aujourd’hui exposés dans le musée du Moyen-Age de Cluny (Paris) et
au musée de Bretagne à Rennes. Ils représentent le baiser de Judas, la
flagellation, le Christ devant Pilate, le Calvaire, la Résurrection et l’agonie
au jardin des oliviers la crucifixion et la résurrection. Trois d’entre
eux figurent les Saints patrons de la famille de Saint Gilles. Sur
six vitraux, les donateurs sont représentés à genoux et en prière.
Si nous ne connaissons rien du
maître autel, de bonnes descriptions, accompagnées de croquis permettent d’apprécier
les fonts baptismaux et un bénitier en granit finement ouvragé. Comme les
vitraux, ces pièces ont été cédées au musée de Cluny en 1873.
A l’extérieur, et comme pour
sanctifier l’espace funéraire, une très belle croix de granit dressait
ses 3,40 mètres sur un piédestal granitique en tronc de pyramide.
Signalée en 1543 dans l’aveu des de Saint Gilles, la croix monolithique
à section octogonale porte, au-dessus de la croisée des bras, un cartouche
dans lequel s’inscrivent les lettres INRI. Deux dates, 1833 et 1869 se
trouvent gravées à la base du fût. Si la première reste une énigme, la
seconde (1869) correspond à son déplacement dans le cimetière actuel.
Au détour des chemins sillonnant
le territoire communal, on découvre la présence religieuse sous des formes
très diverses. Près du château de la Vallée, un monolithe de section
carrée et d’un mètre de hauteur environ se trouve planté dans le parc.
Deux de ses faces sont ornées d’un bas-relief figuratif. Sur l’une, on
peut voir l’effigie de Saint Nicolas revêtu de ses ornements pontificaux.
Le saint domine le saloir occupé par les trois jeunes enfants. Sur l’autre
face, un religieux semble se tenir debout dans une chaire à prêcher. Cette
pierre appartenait à une croix signalée au XVI° siècle près du manoir
de Galisson en Montgermont.
A la Hunelai, c’est par un
cadran solaire qu’est perçue l’omniprésence du culte chrétien.
Taillé en forme d’écu renversé dans une plaque de schiste calcaire, le
riche décor se compose d’un ostensoir encadré de part et d’autre d’une
étoile à cinq branches. Au centre, le bâtonnet témoin perce un cœur
dans lequel on peut lire IHS. Les heures sont figurées par des lances
dirigées vers le cœur et les demi-heures s’apparentent à des larmes. La
date de 1766 est présente à deux emplacements, l’une en chiffres arabes,
l’autre en chiffres romains. Deux noms séparent horizontalement le
panneau de schiste (Jean Lenen et François Le Monnier). On connaît sur le
territoire de Betton trois autres cadrans solaires en schiste datés du
XVII° au XVIII° siècle.
Ailleurs, le respect des rites
religieux permet de suivre l’évolution de la population par la
consultation des registres paroissiaux. On apprend aussi au détour des
pages, qu’un enfant de Jean Leroy, sieur de la Haye Regnaud, est baptisé
en mars 1588 par le subcuré Symon. La mention du registre signale que « le
quatorzième du dict moy du dict mars et an que devant fut baptisé un fils
de Maitre Jean Leroy et femme sieur de la Haye Regnault nommé Claude
parrain noble escuyer Claude Beauvais sieur de la Quinvraye, Maître
Aulnette et autre et puissante damme Catherine Duboy glé dame de izyé,
tesmoingns baptizé par moy subcuré. »
Symon 1588.
Qualifiés de sieurs, Jean Leroy et
Claude Beauvais ont le titre d’écuyer. Non reconnus par leur titre dans
la noblesse, ces personnages appartiennent à la catégorie sociale de
propriétaires de domaines fonciers assez importants. Le titre de dame
accordée à Catherine Duboy est à la fois un signe de déférence et de
positionnement social. Ce document concerne la bourgeoisie de Betton. L’association
des familles s’effectue dans une couche sociale homogène.
Mais la vie religieuse n’est pas
sans heurts. Même dans les campagnes les plus reculées, les troubles de la
Ligue se font sentir. Ils sèment la terreur et le désordre. Ainsi, par
trois fois, en 1591, 1592 et 1597, des incursions de ligueurs mettent à sac
le bourg et ses environs. En 1597, Thomas Champrond de la Basse Tertrais,
trésorier du Conseil de Fabrique, est victime d’une visite des ligueurs.
Fait prisonnier, dépouillé et battu, Thomas réussit à fausser compagnie
à ses tortionnaires. Son témoignage écrit raconte les ravages, meurtres,
viols pillages et autres violences. ’’ Car ils tuèrent prêtres,
femmes, enfants et hommes de tous âges, les martyrisant et faisant mourir
cruellement ’’.