Au cours du premier siècle avant notre ère, ce
territoire qui ne tarderait pas à devenir Betton se répartissait selon
les fermes gauloises sans souci de limites administratives. A l'abri de
la grande cité Condate (Rennes), on y vivait comme dans toute la
campagne riédone, sans trop de difficulté. L'agriculture et l'élevage
assuraient à la plupart une vie décente. Les gesticulations des
légions romaines ne semblaient pas présenter une grosse inquiétude
pour un peuple assuré de sa supériorité de combattant. Certains
avaient même, un temps, loué leurs services de mercenaires à ces
légions. Courageux, le jeune Gaulois affirmait sa noblesse dans les
aventures guerrières. Par ailleurs, depuis plusieurs décennies, bien
des notables et fortunés de la région envoyaient leurs enfants faire
leur éducation à Rome.
La romanisation était en marche. La défaite des
Vénètes n'a été qu'un accélérateur du processus.
Mais, à partir de cet événement, le pays, qui
bascule sous la domination du pouvoir romain, s'organise. Il se couvre
d'un véritable réseau routier. La voie Rennes/Avranches (actuelle
route de Saint-Sulpice-La-Forêt), qui traverse le territoire, est
complétée par un important maillage constitué de voies secondaires
desservant tous les grands domaines fonciers. Onze d'entre eux sont
aujourd'hui identifiés sur le territoire de Betton. Leur emplacement,
parfois décelable sur des photographies aériennes, est confirmé par
la présence de matériel archéologique découvert dans les terres de
labour ou à l'occasion de travaux de terrassement. Parmi ces indices
récoltés, on compte un support de meule circulaire en granite, de
nombreux tessons de poterie bien identifiables, des fragments de tuiles
de couvertures (tegulae), un rebord d'amphore portant la signature
"Augurnus", un cachet médical taillé dans un bâtonnet de
schiste sur lequel on peut lire le sigle "Dort Phor"
accompagné du signe du caducée. Des morceaux de pilettes d'hypocauste
associés à des crochets de bronze pourraient laisser supposer à
l'existence d'un bâtiment thermal situé à proximité d'une de ces
grandes villae.
Et pourtant ces gens là n'étaient pas des Romains.
Mais sans nul doute, conquis par un nouveau mode de vie, les riches
propriétaires du secteur avaient-ils choisi de vivre à la romaine.
Faisant venir du vin dans des amphores, utilisant les très belles
poteries sigillées aux fins décors, abandonnant la braie gauloise au
profit de la toge, certains n'hésitent pas à romaniser leur patronyme
comme l'ont fait les empereurs gaulois Tetricus et Posthumus. Les
critères architecturaux envahissent même un habitat jusqu'alors très
sommaire. Comme une déferlante, cette mode venue d'Italie gomme tout un
pan des traditions ancestrales. Seules quelques croyances bien ancrées
viennent s'ajouter au panthéon des dieux de la nouvelle autorité en
place. Et puis, c'est probablement au cours de cette séquence
chronologique que notre territoire va trouver l'origine de son nom. Pour
sécuriser la région et protéger Condate, à la fin du IIIème
siècle, des groupes de légionnaires sont placés en des points
stratégiques. Il semble qu'une troupe de mercenaires francs d'origine
lète au service des Romains, conduite par un chef nommé Betto, soit
venue s'installer sur le rocher qui surplombe la rivière. Fixé un
certain temps sur ce lieu, la place militaire aurait fini par prendre le
nom du commandant de la troupe. Par la suite et sous les diverses
influences linguistiques, Betton deviendra le nom usuel de cette
première agglomération aménagée face à un prieuré mentionné dès
le XIIème siècle par une charte de l'abbaye de
Saint-Melaine de Rennes.
Les Chemins de la Mémoire