C’est au sein de la famille de Jean ALLEIX et sa
femme Perrine (Perrine LEJAS) que deux garçons Jean François et Pierre
naissent sur la paroisse de Betton. Tous les deux auront une destinée
peu ordinaire qui les conduira des chemins de l’Europe aux pistes d’Egypte.
Perrine donne naissance à Jean François par une
froide journée d’automne le 5 décembre 1768. Trente deux mois le
séparent de son jeune frère Pierre qui arrive dans la famille le 30
septembre 1771. Par leur acte de baptême, on apprend que Jean François
LEJAS et Perrine MOREL parrainent Jean, l’aîné. Alors que Pierre est
accompagné sur les fonts baptismaux par Jacquette MOREL et Pierre BAUDE.
Chacun des deux frères porte le prénom de son parrain. Parfaitement
intégrés dans le rythme rural ils semblent tous les deux se fondre
dans une jeunesse campagnarde accaparée par les petits travaux du monde
paysan. En fait jusqu'à leur majorité, on ne connaît rien de leur vie
sans histoire sans doute loin des préoccupations de l’époque.
Lorsque le 26 janvier 1789 les prémices de la
Révolution débutant à Rennes par des échauffourées connues sous le
terme de ’’la journée des bricoles’’ éclatent, Jean vient d’avoir
20 ans. Pierre n’a que dix sept ans et quelques mois. La majorité
étant alors à 25 ans, les deux mineurs sont encore sous la tutelle
parentale. Quelques mois plus tard, le Conseil de la Révolution
abaissera cette majorité à 21 ans.
Les événements ne peuvent cependant pas leur
échapper. Au travers une information colportée imparfaite et
partielle, c’est de Betton qu’ils vont suivre l’enchaînement
politique et social. Puis, dans cette France déstabilisée, intervient
la déclaration de guerre avec l’Autriche. Le Conseil de la
Révolution lance un appel solennel aux citoyens pour défendre la
nation en danger. Alors le 14 septembre 1792 Jean s’engage au 6°
Régiment de Dragons. Est-il de cette armée révolutionnaire qui le 20
du même mois va bousculer les Prussiens à Valmy ? Vite accoutumé
à l’odeur de la poudre et aux bruits de la bataille, sous le
commandement du général Bonaparte, Jean va suivre l’Armée d’Italie
en 1794 et 1796. Peut-être même sera-t-il de la première campagne d’Egypte
qui intervient deux ans plus tard ? 1800, c’est la deuxième
campagne d’Italie. Entre 1803 et 1804, on le retrouve entre le camp de
Boulogne où il surveille l’Anglais et une intervention dans les
Ardennes. C’est là, qu’après douze ans de périples guerriers, le
11 mars 1804, il finit à 35 ans sa vie à l’hôpital de Charleville.
Son avis de décès signale qu’il est mort en brave défenseur.
Alors que son frère part pour défendre la Nation,
Pierre n’a que 21 ans et décide de rester quelques temps encore au
Pays. Quatre années d’attente pour qu’à son tour il puisse
embrasser la carrière militaire. Il s’engage au 9° Régiment de
Chasseurs à cheval. C’est alors l’Italie, l’Egypte, puis à
nouveau l’Italie. Les victoires se suivent : Ulm le 20 octobre
1805 ; Austerlitz le 2 décembre de cette année là.. En 1806, il
faut repartir vers la Prusse et la Russie pour voir tomber Iéna et
Auerstedt le 14 octobre. Après ce long périple, Pierre se retrouve de
nouveau en Italie. Et là, fatigué par de mauvaises fièvres, il s’éteint
à l’hôpital militaire de Naples le 16 décembre 1806. Comme son
frère, il n’a que 35 ans, mais une vie remplie d’aventures et de
courage.
Ils ne sont pas les seuls gars de Betton à s’être
engagés dans les armées de la Révolution. On peut citer CHOUARAN
Louis, mort au camp de Boulogne en 1806. DEROIN Jean Baptiste, emporté
par la fièvre à l’hôpital de Midelbourg le 26/8/1810 ;
GUINGUENE Joseph, tué au service de la République dans les environs de
Metz ou encore THOUAULT Pierre, qui finit ses jours à l’hôpital de
la Félicité à Bruxelles.
N’ayant jamais atteint les grades prestigieux de
général ou maréchal d’Empire leur nom s’est effacé de la
mémoire collective. Pourtant comme beaucoup d’autres, ils sont de
ceux qui ont écrit l’histoire de France.