Aujourd’hui, trente et un
mars 1789 en l’assemblée convoquée au son de la cloche en la manière
accoutumée ont comparu en lieu ordinaire des délibérations, françois
Fontaine en présence de Monsieur le Procureur fiscal Letour ,
propriétaires, habitants domiciliés de la paroisse de Betton....
Ainsi commencent les
premières lignes du document que les habitants de la paroisse veulent
faire porter à la connaissance du Roi Louis XVI. Ils sont environ 25 du
Conseil de Fabrique de la paroisse à diriger les revendications. Parmi
ceux-là on reconnaît Jean Maigné, Michel Sauvé, Jean Loret, Charles
Barbier, Pierre Hamon etc... En 17 points, ils vont par une énumération
de revendications très raisonnables intercéder auprès du bon Roi pour
seulement un peu plus de justice entre les individus. Aucun d’entre eux
ne remet en cause l’autorité en place.
Au début on se regarde, on
attend ce que l’autre va dire. Qui parlera le premier ? Puis
presque timidement on demande une égalité de chance entre les nobles,
les bourgeois et les roturiers lors des tirages au sort pour l’appel aux
armées. L’assemblée approuve :
« Oui, oui, y a pas
de raison que ceux qui peuvent payer y z’achette des
remplaçants »
Ensuite viennent les
revendications concernant l’accès libre des pâtures communes et francs
alleux. Et tant qu’on y est, il faut dénoncer les ravages que
produisent dans les maigres cultures les pigeons et le gibier souvent
réservés aux seigneurs. La foule s’anime :« y
faut interdire et détruire les fuies (pigeonniers) et les garennes. Y en
a assez des récoltes pigalées »
Chacun soudainement à
quelque chose à dire :
« Et puis, c’est
pas normal que tous on soit obligé d’aller au moulin ou au pressoir
seigneurial, où il faut payer la taxe. » Alors
on revendique le droit de posséder un moulin à bras.
« Attendez, pas trop
vite faut que j’écrive » Le
Procureur a du mal à suivre le rythme du débat.
« Les corvées de
grands chemins ! C’est bien sur qu’il faut l’entretenir la
route. Déjà qu’en hiver c’est tout juste si elle est carrossable.
Mais les nobles y doivent aussi payer D’ailleurs, il faut que l’imposition
soit également réparties sur tous les ordres (la noblesse, la
bourgeoisie et même le clergé). »
« Pour les libertés,
il faut dire aussi que chacun peut aller au moulin qui lui semble
bon. »
« Mais on l’a
déjà dit » « Non, non il faut l’écrire, écris
le ! »
« Faut écrire aussi
que même les roturiers y doivent pouvoir choisir leur emploi quelconque
selon leur mérite et leur capacité. Y a pas de raison que certains
emplois soient réservés aux nobles et aux bourgeois. Ca non y a pas
de raison !»
« Ah, Monsieur le
Procureur, Y faut supplier le Roi d’obliger les officiers ministériels
à faire promptement expédier les affaires ainsi que les juges à rendre
leur justice, Car c’est pas pareil pour tout le monde.! hein
Jean ! »
« Et les abattis sur
les arbres et les droits de bois ?» « Mais non, ça faut pas
la mettre »
« Si, si écrivez
monsieur le Procureur Que les propriétaires soient exemptés de déclarer
les abattis de leurs arbres lorsqu’ils sont émondables. »
Tous, soumis aux mauvaises
récoltes dues à des printemps trop pluvieux et pénalisés par des
excès de la noblesse, ont des revendications à faire connaître au
Roi . Car c’est encore à lui que s’adressent les cahiers de
doléances.
Les chemins de la mémoire
Conseil de Fabrique : C’est une association d’hommes élus pour gérer les biens de la paroisse
Francs alleux : terres ou pâtures communes franches d’impôt et taxe